GEA - Groupe Ethique de l'ARESSAD

Le prendre soin nait d’une pensée humaniste
et vit dans le partage d’actions pour les humains.

Pensée-cadre issue d’échanges entre les membres du groupe (2019).

Document GEA
Groupe Ethique de l'ARESSAD

Des questions et notre reflexion

L'ARESSAD (Association des Responsables des Services de Soins à Domicile) par le biais de ce forum, vous invite à la réflexion éthique, à prendre de la distance sur le monde tel qu’il est formaté.
Rappelons que le GEA (Groupe Ethique de l’ARESSAD) entend par « domicile » tout lieu de résidence dans lequel doit être respecté la dignité d’une personne, pilier inaliénable de la morale soignante.
Posez vos questions au GEA afin qu’il vous apporte ses réflexions, commentez nos avis, faites part de vos accords et de vos désaccords, faites des retours d’expériences sur le forum…

Le but est de ne pas se contenter de l’inertie de l’époque, de montrer qu’une pensée alternative aux dogmes, dissidente sans persécuter est possible, que le mieux est possible.

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La rotation des intervenants à domicile

le 13/07/2019 par claude neuvens - retraité

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La réflexion du GEA :

le 13/07/2019 par Groupe Ethique de l'Aressad
 
Situation : « Les SAAD (Service d’Aide et d’Accompagnement à Domicile) sont contraints, pour de multiples raisons (arrêts maladies, congés, surcharge des plannings…), d’envoyer, au sein d’un même domicile, différentes intervenantes. Ainsi, sur plusieurs mois, par exemple, l’aide à la toilette d’un même bénéficiaire peut être réalisée par 10 intervenants différents, voire plus. La fréquence du changement d’intervenant pouvant être journalière… Certains que cette pratique porte atteinte à la dignité du bénéficiaire, nous sommes amenés à nous interroger et à nous remettre en cause. 
La pluralité des aides à domicile assurant la prise en charge d’une seule et même personne, au motif d’assurer la continuité du service, peut-elle constituer un cas de maltraitance ? ». 
Situation : « Les SAAD (Service d’Aide et d’Accompagnement à Domicile) sont contraints, pour de multiples raisons (arrêts maladies, congés, surcharge des plannings…), d’envoyer, au sein d’un même domicile, différentes intervenantes. Ainsi, sur plusieurs mois, par exemple, l’aide à la toilette d’un même bénéficiaire peut être réalisée par 10 intervenants différents, voire plus. La fréquence du changement d’intervenant pouvant être journalière… Certains que cette pratique porte atteinte à la dignité du bénéficiaire, nous sommes amenés à nous interroger et à nous remettre en cause. 
La pluralité des aides à domicile assurant la prise en charge d’une seule et même personne, au motif d’assurer la continuité du service, peut-elle constituer un cas de maltraitance ? ». 

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Avant-propos
 
A l’heure de la redéfinition du cadre législatif sur l’autonomie des personnes âgées, il semble nécessaire d’éclairer le contexte de cette saisine à travers les éléments suivants : 
La loi du 26 juillet 2005 relative au développement des services à la personne a ouvert au secteur marchand les services d’aide à domicile, qui évoluent depuis vers un modèle industriel, dans lequel les besoins d’aide à la personne sont davantage quantifiés et standardisés.  
 « Réflexion éthique sur la rotation des intervenants à domicile » 
 
La professionnalisation des métiers d’aide à domicile a amené à de nouveaux paradigmes organisationnels, de sorte qu’aujourd’hui, les SAAD doivent respecter des cahiers des charges, notamment en termes de continuité de service, afin que leurs agréments et autorisations perdurent. 
Par définition, les SAAD interviennent dans l’intimité des personnes ; et aider quelqu’un pour sa toilette implique de le toucher, de manipuler son corps, d’être témoin de sa nudité, de respecter la pudeur… Pour être bientraitant, l’acte parait indissociable d’une certaine qualité relationnelle, d’une relation de confiance. En effet, à chaque fois, il s’agit de dialoguer, de tenter de rendre la personne aidée actrice… L’aide à la toilette n'est donc pas simplement un acte technique, c'est aussi un « prendre soin relationnel ». 
 
Problématique soulevée par la saisine
 
La problématique soulevée par la présente saisine est claire : que l’aide à la toilette d’une personne soit réalisée par 10 intervenants différents constitue-t-il un cas de maltraitance ? 
Selon les recommandations de l’ANESM, entre autres, la prévention du risque de maltraitance s’envisage évidemment à travers une organisation du travail adaptée : à la fois aux missions des professionnels, et aux besoins des usagers. 
Focus sur les bonnes pratiques professionnelles, rapporté par un responsable de service d’aide et d’accompagnement à domicile, autre que l’auteur de la présente saisine : 
« L’objectif d’un SAAD est de mettre en place des prestations favorisant le respect de la personne, de son intimité, de ses besoins… Les personnes prises en charge doivent connaître en amont le fonctionnement de la structure, qui elle, a pour obligation d’intervenir en appliquant les recommandations de bonnes pratiques professionnelles. En principe, la demande d’intervention pour une aide à la toilette émane de la personne elle-même. Une concertation entre le bénéficiaire et un responsable de la structure doit donc avoir lieu pour décider d’un planning, et ce selon des règles claires et précises : jours et heures d’intervention, identité des intervenants, acte(s) à réaliser (selon les besoins et les attentes de la personne aidée). Le nombre d’intervenants doit être évoqué et les contraintes organisationnelles également : jours de repos, congés payés, arrêts de travail, départs. De fait, un SAAD se doit donc d’informer le bénéficiaire en cas de mouvement de personnel ». 
Position du GEA : 
 
Nous accompagnons des publics âgés, dépendants, et/ou porteurs de handicap(s). Un public fragile, vulnérable, dont une des particularités est d'avoir des capacités d'anticipation et d'adaptation diminuées. Ainsi, un événement qui semble mineur à l’individu lambda peut perturber significativement le quotidien des personnes dont l'équilibre est précaire ; et la multiplication d’intervenants peut justement constituer une source majeure de contrariétés ; un point de rupture des pilotis médico-sociaux mis en place pour soutenir la personne à domicile. 
 
Conclusion éthique
 
Règlementations et bonnes pratiques professionnelles précisent, qu’avant tout, l’usager doit être informé de ses soins et des modalités selon lesquelles ils vont lui être prodigués, afin qu’il puisse adhérer ou non, à leur réalisation. 
 
Une fois le contrat établi, il existerait un paradoxe franc entre faire bénéficier à quelqu’un d’une aide à domicile, donc liée à un besoin objectif d’accompagnement personnalisé dans son milieu de vie, et dépersonnaliser l’action à réaliser, en ne l’envisageant que par l’alternative du « fait/non fait ». A ce titre, l’obligation de bientraitance ne saurait s’effacer devant la « raison de service ». 
 
Mais, la réalité fait que, parfois, la rotation des professionnels est inéluctable. L’humain peut vraisemblablement entendre une telle organisation momentanément. En effet, si la temporalité d’une rotation importante n’est pas déraisonnable, alors elle peut être acceptable par et pour l’humain. En revanche, faire de la rotation incessante des professionnels un fonctionnement institué, ne constituerait-il pas un risque majeur pour l’usager, au moins aussi important qu’un arrêt du service, en termes de qualité de la prestation ? 
 

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